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Bulletin d'information n°88. Septembre 2016

L'évolution de la PMA entre législation et nécessité

La science juridique est une science en mouvement constant, tentant toujours de prendre en compte le facteur social . Le législateur intervient soit pour régler une situation qui se répète fréquemment, soit pour devancer des situations à venir . Ce dernier cas concerne particulièrement le domaine des sciences et davantage encore les technosciences. Dans le domaine précis de la médecine, l'évolution des techniques est remarquable. Chaque année voit de nouvelles techniques apparaître. La médecine de la reproduction en est une illustration.

« PMA » est l'abréviation de l'expression de « procréation médicalement assistée » . On la définit généralement comme une technique de procréation artificielle pour aider les couples qui ont des troubles à avoir des enfants . La loi 2001-93 du 7 août 2001 relative a pourtant choisi une autre expression au lieu de P.M.A., plus générale : c'est l'expression « médecine de la reproduction ». « Au sens de la présente loi , la médecine de la reproduction s'entend de tous les actes médicaux entrant dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation et visant à lutter contre l'infertilité » (1) , poursuivant « la médecine de la reproduction s'entend , au sens de la présente loi , des pratiques cliniques et biologiques in vitro ou de toute autre technique ou pratique d'effet équivalent permettant la procréation humaine en dehors du processus naturel » (2).

Si cette loi a le mérite d'exister, elle pose - ainsi que nombre d'autres lois - un problème général, celui de l'utilité des textes juridiques face à l'évolution des technosciences. Ce problème est simple : comment une loi censée encadrer un domaine hautement technique, élaborée en 2001, n'ayant jamais été modifiée, peut être encore valable après quinze années de progrès technoscientifiques ?

Il nous semble difficile de penser que cette loi puisse être encore appliquée sans modification, sans rajouts, sans enrichissements, car de nouvelles techniques ont vu le jour, toutes fort utiles.

Si nous prenons l'exemple précis de la PMA, nous constatons d'abord qu'elle ne se limite pas aux seuls couples souffrant de problèmes de stérilité mais qu'elle cherche aussi à assurer une procréation saine pour les couples souffrant de maladies héréditaires, pouvant être transmises à leurs enfants . A cet échelle évoluée , ladite procréation saine aura pour but de féconder deux gamètes sains, et non pas n'importe quels gamètes. C'est là qu'intervient le génie scientifique, qui bouleverses encore une fois, nos certitudes : cette fécondation de gamètes sains nécessite l'intervention d'une troisième personne. Le nom de la technique utilisée devient alors procréation médicalement assistée à trois parents. Cette nouvelle technique permettrait à certaines femmes de ne pas transmettre à leur bébé des maladies génétiques graves, telles que des dystrophies musculaires, en remplaçant leur ADN mitochondrial défectueux par de l'ADN sain, provenant d'une troisième personne (4). Ce qui est tout aussi extraordinaire est le fait que les enfants issus de cette technique ne ressembleront qu'à leurs deux parents, non au tiers donneur. En effet, les caractéristiques humaines sont codées dans l'ADN du noyau de la cellule, et non pas dans l'ADN mitochondrial.

En revenant à notre loi 2001-93 du 7 août 2001 relative à la médecine de la reproduction, nous remarquons la sévérité des conditions posées par le législateur, comme le fait que « les gamètes doivent provenir uniquement d'un couple marié » (article 4) et l'interdiction du tiers donneur (5). Il va donc sans dire que la technique de PMA à trois personnes, notamment pour la femme souffrant de maladies génétiques graves et transmissibles, lui sera interdite, entraînant l'impossibilité d'avoir une descendance saine.

Afin de concilier entre la législation et la nécessité , une modification des articles 4 , 7 , 10 et 14 de loi N° 2001-93 du 7 août 2001 relative à la médecine de la reproduction nous semble aujourd'hui indispensable, tant pour résoudre les problèmes d'infertilité que de concevoir une procréation saine . Le Droit, tel qu'on nous l'enseigne sur les bancs de l'université, jouera pleinement son rôle social

Oussema YOUSFI, Etudiant à la Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis.

(1)Loi N° 2001-93 du 7 août 2001 relative à la médecine de la reproduction. Article 1er.
(2)Article 1er, alinéa 2.
(3)Agence France-Presse.
(4)Agence France-Presse.
(5)Article 14 de loi N° 2001-93 du 7 aout 2001 précitée.


 
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