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Bulletin d'information n°74. Septembre2014

Digressions à propos du « Dialogue national sur les politiques, les stratégie et les plans nationaux de santé »

« L'hypocrisie est un vice à la mode et tous les vices à la mode passent pour vertus » Molière

Le pompeusement dénommé « Dialogue national sur les politiques, les stratégie et les plans nationaux de santé » s'est tenu à Tunis du 2 au 4 septembre 2014. Cette conférence était la cinquième et dernière étape de la première phase du dialogue de santé, son objet officiel étant de « parvenir à un engagement fort et respecté par toutes les parties prenantes pour développer le système de santé afin de garantir le droit à la santé et de répondre aux aspirations des citoyens en particulier » (1).Elle se clôtura par l'adoption de la déclaration « de la consécration du droit à la santé en Tunisie » dont nul ne connaît la teneur.

Aux dires du département de la Santé, tels que reportés par la presse, le « Dialogue » a englobé plus de 4400 citoyens (choisis sur quelle base ?) et professionnels de santé dans le cadre de 70 ateliers et de groupes de travail organisés dans toutes les régions.(2).

Ce « Dialogue » n'est pas une invention tunisienne. Il existe depuis 1998 en Suisse où il est dénommé dialogue de la « Politique nationale suisse de santé » et où il cherche à créer un outil commun pour relever le les défis actuels et à venir dans le domaine de la santé et d'unifier la démarche des différents cantons. Il existe également au Canada où il se dénomme « Dialogue national sur la transformation des soins de santé »(3). ou encore au Togo où il concerne plus spécifiquement « la lutte contre le VIH Sida, la tuberculose et le paludisme »(4). Mais quelque soit le thème d'un « Dialogue », il s'agit toujours d'une consultation publique qui constitue lorsqu'il est bien mené, qu'il est suffisamment inclusif et large, un excellent exercice de démocratie administrative ou, pour utiliser le langage des politiques publiques, d'une bonne initiative « bottom up » ou ascendante, de la base - les citoyens - vers le sommet - les décideurs .

Seulement, pour ce qui concerne la santé, cette initiative ne brilla pas par la clarté de son objet, dès ses débuts. Le discours de lancement du chef du gouvernement(5). la concernant, parlait de la « définition d'une nouvelle politique de santé et l'identification des axes de réforme du système de santé » et évoquait les principes de la participation et de l'inclusion. Tenu de respecter les directives de l'OMS(6). en la matière, le département de la santé fit appel, à l'automne 2012, à bon nombre de participants-experts issus de la société civile. Mais cette initiative d' « inclusion », menée dans la précipitation et enserrée dans des délais fort courts, s'essouffla rapidement. La centralisation décisionnelle reprit le dessus.

On le sait : l'enfer est pavé de bonnes intentions. L'arrêté organisant le travail des différentes structures du « Dialogue » n'arrive qu'après 18 mois et reflète une centralisation du travail au sein du ministère de la Santé. Groupes de travail , comité technique et cellule de gestion du « Dialogue » sont tous placés sous la houlette du ministère de la santé, ce qui nous révèle clairement les limites de la stratégie participative(7).Nous ne trouvons nulle trace des comptes-rendus d'ateliers sur le site du ministère de la Santé. La rencontre finale elle-même est le fruit des propositions de la Commission technique homonyme instaurée par l'arrêté du ministre de la Santé du 6 juin 2014.

Exagérément ambitieux, trop rapidement mené, insuffisamment ouvert à l'ensemble des acteurs du monde de la santé, les résultats de ce coûteux « Dialogue » perdureront-ils et reflèteront-ils réellement les soucis, doléances et souffrances de la base ? Le « Dialogue » demeurera-t-il à l'état d'un complexe exercice de démocratie, dans un domaine particulier et en une période précise, ou saura-t-il dépasser les turbulences du moment et initier des réformes pérennes? Il est sans doute trop tôt pour le dire, même s'il est permis d'en douter.

Signe des temps : le même « Dialogue » sera organisé fin septembre dans le domaine de l'éducation(8). Il s'agirait donc bien plus d'un nouveau mode de travail, que d'une réponse à un besoin réel. Irons-nous jusqu'à le qualifier de « mode » tout court ?...

Pr. Amel AOUIJ MRAD

(1) http://www.africanmanager.com/171306.html
(2)Quinze groupes de travail furent mis sur pied pour des rencontres de terrain, suivies d'une consultation d'experts pour discuter des résultats des enquêtes, propositions et orientations des stratégies de réforme. La commission technique fut chargée d'analyser les données de base, mettre en place une base de données, , présenter les différentes approches de réformes possibles.
(3)https://www.cma.ca/Assets/assets-library/document/fr/advocacy/HCT_townhalls_fr.pdf
(4)http://news.icilome.com/?idnews=784202
(5)Il s'agissait de M. Hamadi Jebali.
(6)Soutenu par l'Organisation Mondiale de la Santé, ce Dialogue avait été initié dès octobre 2012 par le précédent ministre de la Santé.
(7)En effet, au mois de septembre 2014, les travaux des quatre commissions instituées par l'arrêté du 6 juin 2014 se poursuivaient encore et ces commissions étaient, comme à l'accoutumée, composées essentiellement de membres du ministère et de la Fédération générale de la santé. Seule la presse nous révèle avec parcimonie les problèmes récurrents qui furent relevés au cours de ce marathon et qui sont connus de longue date. Ils concernent le financement du système sanitaire, le manque de médicaments dans les pharmacies hospitalières et la nécessité d'améliorer les prestations.
(8)http://directinfo.webmanagercenter.com/2014/09/05/tunisie-lancement-dun-dialogue-societal-sur-leducation/


 
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