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Bulletin d'information n°32. Mai 2010
Commentaire d'arrêt du Tribunal Administratif
(Appel n°25406 et 25421 du 16 novembre 2007)
La balance de la justice semble mettre du temps à trouver
une position d'équilibre dans le domaine de la responsabilité médicale, particulièrement
dans le cadre des établissements publics. Le juge administratif tente pourtant de
prendre une position claire dans les deux décisions ici commentées.
Le 26 octobre 1986, une jeune femme est hospitalisée à l'institut Salah Azaïez
(Institut de carcinologie) en vue de subir une ablation de l'utérus.
Durant l'intervention, elle eût besoin de sang et l'hôpital recourut à l'appel de don
auprès de quatre donneurs. Suite à son intervention, elle se retrouva atteinte du virus du SIDA
et les analyses révélèrent que le sang qui lui avait été transfusé était contaminé. La dame décéda
d'une pneumonie en 1992, et la responsabilité de l'Institut Salah Azaiez est engagée.
La présomption de faute
La jurisprudence administrative est constante : elle considère que la responsabilité médicale est basée
sur la présomption de faute chaque fois que le patient est atteint par un dommage étranger à celui pour
lequel il s'adressait à l'hôpital. Le médecin (ou l'hôpital) ne peut s'exonérer de cette responsabilité
que s'il prouve l'absence de faute.
Dans cette affaire, la victime est hospitalisée en vue de subir une ablation de l'utérus et suite à une
transfusion sanguine, elle se trouve atteinte d'un virus dont elle n'était pas porteuse à son admission
à l'hôpital. La faute est donc bien celle de ce dernier, qui n'a pas procédé aux tests du sang à transfuser.
Pour tenter de s'exonérer, l'hôpital se contenta d'apporter une liste des centres de transfusion sanguine
auprès desquels s'était effectuée la collecte du sang, avec les examens médicaux prouvant que les donneurs n'étaient
pas porteurs du virus du SIDA. Le juge administratif a estimé cette preuve insuffisante. Cette attitude profitable
à la victime et à ses ayants-droits est cependant fort sévère puisqu'à la date de la transfusion, les test
de recherche du SIDA étaient encore inconnus en Tunisie et qu'une grande partie du personnel de santé ignorait l'existence du virus.
En fait, le juge a procédé à une exploitation maximale de la loi n°82-26 du 17 mars 1982 relative aux transfusions sanguines.
Cette loi impose qu'avant chaque prélèvement sanguin, une série de tests soit effectuée non seulement pour identifier le groupe sanguin
du donneur mais aussi et surtout pour détecter les maladies transmissibles ; le sang laissant apparaître une quelconque maladie est immédiatement
détruit et le donneur averti des maladies détectées. Cette loi engage la responsabilité du médecin ayant effectué le prélèvement sur lequel pèse
une obligation de sécurité (le prélèvement, le transfert et toute autre opération sont accomplis par le médecin personnellement ou sous sa direction :
article 2 al. 2, article 3 al. 1, article 4 al. 1) ainsi que celle l'établissement chargé de la collecte du sang (Les institutions de prélèvement
sont tenues de respecter les bonnes pratiques et de contrôler le matériel garantissent la meilleure qualité des produits sanguins distribués aux malades :
article 5 alinéa 1er et les articles 6, 7 et 8).
L'autre apport de la jurisprudence administrative en matière de responsabilité hospitalière est de substituer celle de l'administration centrale,
soit le ministère de la Santé Publique à celle de l'EPS pour optimiser les chances d'indemnisation de la victime. Là également, notre juge
administratif, de fibre sensible et de nature généreuse, tord le cou au passage à quelques règles de la plus élémentaire orthodoxie juridique.
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