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Bulletin d'information n°30. Mars 2010

Commentaire du jugement du Tribunal Administratif de première instance n° 1/12964 du 4 décembre 2009



Le 12 mars 2004, et sur plainte des riverains de la Cité Romana, la commune de Tunis prend par arrêté la décision d'enlever le relais satellitaire de téléphonie mobile, installé depuis quatre années par la société " Tunisie Télécom " à proximité d'habitations. Cet arrêté est immédiatement exécuté et le relais désinstallé.

Tunisie Télécom introduit alors un recours pour excès de pouvoir et demande au Tribunal Administratif d'annuler ledit arrêté, estimant d'une part que la commune ne possédait pas le pouvoir de démolir le relais d'autant plus, d'autre part, qu'aucune étude scientifique n'avait selon elle, apporté la preuve des dommages que ce type d'installation pouvait entraîner sur la santé humaine. Elle rajoute pour conforter son moyen que l'expert désigné par la justice n'avait pas abouti à des conclusions de dommages certains. Elle rajoute à titre superfétatoire que la décision de la commune causerait inéluctablement un retard préjudiciable à ses services.

Quant à la requête des habitants auprès des autorités communales, elle se basait sur un certain nombre d'études scientifiques permettant de penser au contraire que les relais satellitaires, du fait des ondes et des vibrations permanentes (ondes hertziennes à haute intensité) généraient à la longue, des dommages irréparables à la santé humaine, particulièrement à celle des sujets fragiles (personnes âgées et enfants).

Tunisie Télécom avança comme principaux moyens d'abord l'absence de certitude scientifique quant au lien de causalité existant entre l'installation des relais de téléphonie mobile et les conséquences sanitaires.

Le Tribunal Administratif, après avoir rappelé la mission de protection de la salubrité publique pesant sur les communes, mission s'intégrant dans sa préservation de l'ordre public, et justifie sa décision essentiellement sur le principe de précaution. Les caractéristiques de ce principe, et notamment l'absence de risque avéré et l'absence de certitude face aux conséquences d'une activité, convenaient parfaitement à ce type de situation nouvelle.

Ainsi, après les juridictions de l'ordre judiciaire (Tribunal de première instance de Sfax 19 décembre 2005 n°35402 (Tribunal de première instance de Sfax : affaire n°35402 du 19 décembre 2005, Besbes c/ Orascom Telecom) et Cour d'appel de Sfax 12 Avril 2007 n°20290 (Cour d'appel de Sfax affaire n°20290 du 12 avril 2007 Société Orascom Télécom c/ Besbes), " ont fait preuve d'audace et ont pris une attitude avant-gardiste en prononçant la désinstallation des antennes relais d'un toit d'un immeuble au nom du principe de précaution malgré l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par le réseau de la téléphonie mobile " (Nizar Kriaa, "L'attitude de précaution à travers la jurisprudence du Tribunal Administratif", à paraître dans les actes du colloque " Risque et précaution ", 2010). Le jugement du Tribunal Administratif permet à ce principe de création européenne de s'imposer dans le paysage juridique tunisien et de s'intégrer dans l'ensemble des principes du droit de l'environnement en rapport avec le droit de la santé.


La Cour de justice des communautés européennes a consacré le principe de précaution dans certains de ses arrêts qui ont fait date. Le plus souvent, il s'agissait de risques environnementaux (organismes génétiquement modifiés) ayant des répercussions sanitaires (11 sept. 2002 Pfizer Animal health, 11 sept. 2002 Alpharma, 21 octobre 2003, Solvay Pharmaceuticals ….).

L'argumentation de la CJCE est quasiment invariable : " Lorsque des incertitudes scientifiques subsistent quant à l'existence ou à la portée de risques pour la santé humaine, les institutions communautaires peuvent, en vertu du principe de précaution, prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées ".

Peut-on dès lors affirmer que notre Tribunal Administratif est en train de s'approprier un à un la plupart des principes du droit communautaire de la santé et de l'environnement ? En effet, la consécration du principe de précaution fait suite à celle du principe de la sécurité juridique (Tribunal Administratif 8 février 2008, Mzoughi). Nous ne saurions qu'applaudir à cela.



 
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