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Bulletin d'information n°25. Octobre 2009

Tribunal Administratif, Appel référé, 23 avril 2009, (affaire n° 721115)
Chef du contentieux de l'Etat représentant le ministère de la Santé Publique c./ Raafat Khammouma, inédit.



Résumé des faits et de la procédure
Monsieur R. Khammouma dépose le 24 juin 2008 une plainte auprès du ministère de la Santé Publique exigeant l'ouverture d'une enquête pour connaître les causes du décès de sa mère qui avait été traitée dans la clinique privée "Avicenne". Le ministère lui refuse l'accès au dit rapport, le privant ainsi de la connaissance des résultats de l'enquête.


En se basant sur les dispositions de l'article 81 de la loi n° 72-40 du 1er juin 1972 relative au Tribunal administratif telle que modifiée, notamment par la loi organique n° 96-39 du 3 juin 1996, prévoyant que " dans tous les cas d'urgence, les présidents de chambres de première instance ou d'appel peuvent respectivement ordonner, en référé, toutes mesures provisoires utiles sans préjuger du fond et à condition de ne pas entraver l'exécution d'une décision administrative ", et sur la demande du requérant, le président de la quatrième Chambre de première instance du Tribunal administratif ordonna en référé, le 13 janvier 2009 (Aff. n° 711162), au ministère de la Santé Publique de permettre au demandeur d'avoir son rapport d'enquête identifiant et mentionnant les causes du décès de sa mère.
Le Chef du contentieux de l'Etat représentant le ministère de la Santé Publique interjette appel contre ladite ordonnance de référé. Le juge d'appel (Aff. n° 721115 du 23 avril 2009) confirme la position adoptée en première instance.

Observations
Dans cette affaire, le Tribunal administratif, a consacré en appel comme en première instance, les deux principaux points suivants.
D'une part, le juge administratif a cherché un fondement original et utile à la mesure d'urgence qu'il ordonne en se référant essentiellement à la loi 91-63 du 29 juillet 1991 relative à l'organisation sanitaire. D'autre part, il montre une certaine prudence en ce qui concerne le respect des conditions de l'urgence prévues par l'article 81 de la loi 72-40 du 1er juin 1972 relative au Tribunal administratif.

I - L'originalité du fondement de la mesure d'urgence : la loi de 1991
Le besoin de donner des réponses provisoires, sans préjuger du fond, à des questions qui se posent avec une acuité particulière, a conduit le Tribunal administratif à traiter chaque type de litige d'une manière assez particulière. Le juge est conscient qu'un tel particularisme donne une physionomie originale à chaque mesure d'urgence.
En effet, et en application des dispositions de la loi n° 91-63 du 29 juillet 1991 relative à l'organisation sanitaire, le juge administratif, se référant à l'idée d'unité du service public de la santé, place sur un pied d'égalité l'ensemble des structures et établissements sanitaires publics et privés. Cette exigence concerne notamment leurs obligations envers tous les malades qui recourent à leurs services. Le Tribunal administratif précise en ce sens que la protection de la santé de toute personne dans les meilleures conditions possibles est un droit garanti par tous les membres des professions de santé ainsi que les structures et les établissements de soins et d'hospitalisation, publics ou privés ayant pour mission d'assurer la protection sanitaire de la population.

Ainsi, toutes les structures et tous les établissements sanitaires publics et privés doivent fonctionner dans des conditions garantissant :
- les droits fondamentaux de la personne humaine et la sécurité des malades qui recourent à leurs services ;
- le respect des règles d'hygiène fixées par la législation et la réglementation en vigueur ;
- la dignité professionnelle de l'ensemble des personnels de santé ainsi que l'indépendance scientifique des médecins, pharmaciens et médecins dentistes conformément à leurs codes de déontologie respectifs.

Par conséquent, et vertu de l'article 7 de la même loi de 1991, le rôle des services de l'inspection du ministère de la Santé Publique est de contrôler et d'évaluer les activités des personnels et des structures sanitaires des secteurs public et privé. Ce rôle s'inscrit dans le cadre de la garantie des droits fondamentaux des usagers des services de santé, les services de l'Etat assurant ce contrôle étant considérés comme les garants de la sécurité des relations entre les bénéficiaires et les prestataires desdits services. Tous les actes, documents et rapports pris dans le cadre de leur mission sont considérés comme étant de plein droit accessibles aux personnes ayant intérêt à connaître leur contenu. Ces actes s'insèrent et concourent dans la réalisation d'une mission d'intérêt général.

II - Le respect des conditions de l'urgence : l'article 81 de la loi du T.A. :
Dans l'esprit du juge administratif, il semble que les référés constituent des réponses aux dysfonctionnements administratifs. Seulement, le cadre déterminé par le législateur est très restreint. Il s'agit toujours de respecter les conditions mentionnées par l'article 81 de la loi du 1er juin 1972 tel qu'ajouté par la loi organique du 3 juin 1996. En ce sens, le Tribunal administratif demeure fidèle à son rôle traditionnel dans la définition de sa compétence et dans la détermination des règles régissant ce type de contentieux.

Obliger l'administration à mettre à la disposition des administrés les rapports des enquêtes effectuées par les services d'inspection du ministère de la Santé Publique dans des structures privées constitue une grande avancée. Le juge administratif, tout en respectant les dispositions de l'article 81 essaye de donner à sa décision une double motivation.

Selon la première de ces motivations, cette obligation ne peut jamais toucher le principe de neutralité de l'Administration, car elle ne peut être considérée comme constituant ou produisant des moyens de preuve à l'appui des prétentions des parties aux litiges. La neutralité de l'administration, corollaire du principe d'égalité, doit être assurée en fonction des situations différentes des usagers du service public.
D'autre part, le Tribunal administratif relie sa décision au droit d'agir en justice des citoyens. Ce droit, considéré par le juge administratif comme un principe général de sécurité juridique, ouvre la possibilité effective, pour toute personne intéressée, de contester devant lui les mesures d'application des lois soumises à son contrôle.

A partir de notions classiques, telles que le service public, la neutralité de l'Administration, les mesures conservatoire, le droit d'ester en justice, mais également de notions plus récentes dont certaines encore en évolution, telles la sécurité juridique, la transparence de l'administration, le Tribunal administratif a cherché à consolider ses pouvoirs en matière de mesures d'urgence et par conséquent de faire face aux dysfonctionnements administratifs.

Ce à quoi nous ne pouvons qu'applaudir.


 
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